dimanche 13 juin 2010

De la démocratie en Russie et en Chine

Nous le savons, et l'Histoire nous l'enseigne, que la puissance dominante impose sa vision de la société et même du monde. Ainsi en était t-il de la France napoléonienne, qui début 19ème voulait exporter son modèle de société (lui même basé sur celui de l'empire Romain) avec pour pour principal argument son Code civil.
Comme le disait Thucydide, l'Histoire est un perpétuel recommencement. A ce titre, les puissances grandissent, s'exportent même. Du temps de la guerre froide, les 2 modèles capitalistes et socialistes voulaient s'exporter et imposer leur hégémonie, pas plus l'URSS que les États-Unis par ailleurs qui prétendent incarner les droits de l'Homme et la démocratie. Du moins, les manuels d'Histoire aiment à raconter que les États-Unis incarnent le pays des libertés, tandis que l'URSS le pays des restrictions. Beaucoup nous expliquent doctement que la Russie est une dictature, sans même comprendre  la nature et la composante de cet État géant. Il en va de même pour la Chine, qui est elle aussi sujette a cette critique.

Qu'est ce que la Russie aujourd'hui ?
Un grand pays sans nul doute. Non nous pouvons même ajouter LE plus grand pays au monde par sa superficie. Plus de 17 millions de kilomètres carrés. Une démographie chancelante (140 millions actuellement, déclinante chaque année), une économie qui dépend surtout de l'exportation des hydrocarbures (immenses réserves de pétrole, de gaz naturel notamment en Sibérie) mais aussi de l'industrie de l'armement auprès d'États tiers, un peuple néanmoins ressoudé devant un chef qui a restauré une fierté entamée par la période Boris Eltsine où le niveau de vie chuta considérablement et où des pans entiers de l'économie furent aux mains des oligarques eltsiniens, souvent de suroît proche des milieux occidentaux.

Alors cette Russie-là, tenue avant 2008 d'une main de fer par un Vladimir Poutine à la popularité toujours sans une égratignure, maintenant dirigée par un Dimitri Medvedev dans le discours bien moins virulent et autoritaire que Poutine, avons-vous intérêt à nous en rapprocher? Plus que jamais: notre intérêt de Français doit être dans le fait de recouvrer pleinement et entièrement notre souveraineté nationale dans tous les sens du terme. Cela n'exclut pas, à terme, une remise en question tant de notre appartenance à l'OTAN qu'à l'Union européenne. Toutefois, si cela peut paraître audacieux, nous dirons ceci: celui qui ne tente rien, n'aura rien. Alors certes, il serait pour le moment sans doute un peu hâtif - pour prendre l'exemple précis de l'Union européenne - de supposer un éventuel futur retrait (prévu par une clause du Traité de Lisbonne !). Il serait évidemment plus utile et plus raisonnable - pour le moment - d'essayer d'infléchir les politiques déraisonnables, politiquement, économiquement et socialement parlant se décidant dans les instances bruxelloises tant de l'Union européenne que de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Faisons valoir notre veto, opposons nous avec force par exemple, à tout élargissement de l'Alliance atlantique vers les frontières russes et travaillons d'arrache-pied dans la conclusion d'un véritable partenariat stratégique à pied d'égalité liant les nations européennes et la Russie, grande nation qui de tout temps a et appartient pleinement au continent (partiellement du moins) et à la culture européenne.  Enfin, ne perdons pas de vue un développement sans précédent au niveau mondial: le déclin avancé de l'Occident à proprement parlé et la montée en puissance  soutenue des nations émergentes faisant notamment parties du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine  Dans le monde multipolaire de demain, moult décisions ne seront plus seulement prises à Washington, Bruxelles, Londres ou Paris (ou ailleurs d'ailleurs  Mais aussi à Moscou, Pékin, Brasilia ou New Delhi. La France, a par conséquent une tâche historique: aider au rapprochement entre tous les peuples, combattre les idées reçues et éviter un possible "conflit des civilisations" hypothétique et coopérer pleinement et entièrement avec les puissances émergentes et dont la Russie est et reste un partenaire incontournable.

Il faut répondre à la question d'un point de vue géostratégique, et bien évidemment dans la défense de nos intérêts premiers de Français. Aujourd'hui, la nation française, embourbée dans une construction européenne anti-nationale, dénaturée, et dans une autre organisation (militaire cette fois-ci), l'OTAN, est hélas plus à même de poursuivre souverainement ses intérêts les plus légitimes. Une part non négligeable de nos politiques (économiques notamment mais pas seulement) se décident dans l'ombre, dans les coulisses du pouvoir notamment à Bruxelles mais ailleurs également. La Russie à ce titre demeure un partenaire de premier plan pour notre pays qui de l'Alliance franco-russe de 1892 conclu alors entre le président de la République française d'alors Sadi Carnot et le tsar de l'Empire russe Alexandre III à l'épopée du régiment Normandie-Niemen où soldats français libres comme soviétiques se battirent vaillamment l'hydre nazi et fasciste a toujours été une nation privilégiée par nombre de nos dirigeants. Le Général de Gaulle l'avait compris, les républicains et gaullistes que nous sommes le comprennent toujours. Une Europe forte de ses nations souveraines, des peuples, cette République européenne devrait inclure une Russie avec laquelle nous partageons un legs historique, culturel et je dirai même émotionnel commun. Alors nous entendons les critiques vis-à-vis de la démocratie, des droits de l'homme en Russie. A ce sujet comme dans d'autres, la République française doit être claire et doit bâtir une politique étrangère qui se tient: Non ingérence dans les affaires d'État à État, soutien à l'intégrité territoriale de tout État et là en l'occurrence à celle de la Fédération de Russie et défense de nos valeurs, certes, mais tout en ne donnant pas de leçon à ce grand peuple qui demande respect et égalité de traitement réciproquement. Ce faisant, les postures droit de l'hommistes qui consistent à systématiquement dénigrer une nation tout entière portée à la vindicte pour cause de "non-respect des droits de l'homme"  devrait cesser. La France comme la Russie méritent mieux et cette idée saugrenue et néo-impérialiste qui est celle du droit d'ingérence n'est pas une manière de mener à bien une politique étrangère. Enfin pour clore ce phénomène récurrent que certaines nations nous prêtent, celui d'être un peu un "donneur de leçons", nous ajouterons que le respect mutuel est la base de toute relation saine: si la Russie nous demande de ne point nous ingérer dans ses affaires internes, nous  demandons de même réciproquement. Et enfin, pour dissiper toutes les craintes, sachons que la Russie elle-même renforcera son État de droit sans que l'on lui demande expressément de le faire, les dernières déclarations du président Dimitri Medvedev sont encourageantes à cet égard et méritent attention.
Fort de cet exemple russe, nous voyons donc que cet idéal démocratique mondial semble être une illusion pour beaucoup si portée de manière arrogante et souvent, osons le dire, néo-impérialiste. Il convient donc aux peuples eux-mêmes, seuls dépositaires de leurs souverainetés respectives, de déterminer leurs destins à chacun en toute indépendance.

Venons-en maintenant à cette grande nation pluri-millénaire qui est la Chine, communément nommée Empire du milieu, expression chinoise d'antan démontrant déjà l'influence de ce mastodonte asiatique. De fait, il convient de ne pas prendre le peuple chinois pour un peuple féodal. Or, indiscutablement, les pressions des droitdl'hommiste pour imposer la démocratie conjuguée à la pression des américains pour réévaluer le Yuan ne peuvent qu'éloigner la Chine des valeurs occidentales d'une part, et indique à la Chine la voie "raisonnée" à suivre d'autre part. Car la Chine ne peut pas se permettre d'instaurer une démocratie. De même qu'elle fait ce qu'elle veut avec sa monnaie: il n' y a que nos amis de la BCE qui prétendent à une monnaie forte et qui s'inquiètent lorsque celle-ci baisse.
En outre, contrairement à ce que les gens croient, la Chine n'est pas une pays, c'est un empire constitué d'immenses territoires morcelés et de surcroît, souvent entrain à de nombreux conflits au sein d'eux mêmes (confère le problème des Ouïgours). Le Tibet est, à cet égard la parfaite illustration. Une région déclare faire sécession, il semble normal que le gouvernement chinois intervienne. Peut-être pas par la force certes, mais il doit néanmoins intervenir pour assurer l'unité de la nation. Ainsi en  irait-il de même si la Bretagne ou l'Alsace déclarait faire sécession. On peut comprendre les réticences chinoises  vis-à-vis d'une espèce d'intrusion occidentaliste dans ses affaires intérieures. Il y a un peu plus de 20 ans, le premier secrétaire du Parti Communiste de l'Union Soviétique (PCUS) Mikhail Gorbachev lançait sa fameuse Glasnost qui instaura davantage de liberté d'expression. Quelques années plus tard, URSS n'était plus. La Chine sait que si elle instaure la démocratie sous impérium occidentaliste, il se peut fort qu'elle subisse le même sort funeste qui amena la fin de l'Union soviétique. Par conséquent, hâtons-nous de tout sentimentalisme et défendons l'idée d'avoir des relations fortes et raisonnables avec cette grande puissance (voire superpuissance) du monde de demain qui est la Chine et cessons toute politique d'ingérence qui de toute façon serait par essence contre-productive. L'ère du droit d'ingérence doit être révolu et celui d'un équilibre rationnel des puissances du monde revenir en force tout en défendant la Charte de l'Organisation des Nations Unies et ses principes intrinsèques. Par ailleurs, nous connaissons les problèmes de la Chine: faiblesse de la demande intérieure (40% de son PIB) du fait d'un Yuan faible (privilégiant l'export), consommation atone à mettre en partie sur l'autel d'un taux d'épargne très élevé,  problèmes démographiques liés à des politiques malthusiennes en la matière (...) qui ne se résoudront pas par l'unique démocratie. Enfin, n'oublions pas que nous, européens sommes très mal placés pour donner des leçons de démocratie dès lors qu'une Commission européenne intégralement non-élue s'est donnée pour but de détruire les États et ses services publics qui les composent.


Dans ce billet, nous avons tenté de démontrer à quel point l'arrogance du monde occidental vis-à-vis de la Chine et de la Russie était patente. Critique des USA sur le Yuan alors que eux aussi jouent sur la monnaie pour doper leurs exportations, et critique sur le thème de la démocratie. Or, indubitablement, nous devons mettre au crédit de V.Poutine sa capacité a avoir restauré l'autorité de l'État après qu'une  poignée d'oligarques s'était accaparée des ruines de l'économie ex-soviétique. Quant aux Européens, dont les droit de l'hommistes sont parfaitement représentés par Kouchner et consorts devraient plutôt faire profil bas quand on voit la capacité de l'UE et de sa Commission à nier les peuples en permanence.


Par Deniz Servantie et Stanislas Korst.