mardi 19 octobre 2010

Décryptage d'un tract de l'UNEF

Ce matin, en me dirigeant vers la Fac, j'ai été cueilli par des militants de l'UNEF qui m'ont alors donné un prospectus dans lequel ils y dénoncent la réforme des retraites. Je me réserve ici donc un droit de réponse à ce qui y est proposé et, à l'appui du tract, démontrer à quel point les dénonciations qui y sont faites sont remplies d'approximations et inexactitudes, et place les étudiants dans un position victimaire.
Pourquoi s'attaquer à l'UNEF et non aux syndicats "classiques"? Je m'attaque à l'UNEF car en tant qu'étudiant, je préfère me concerter sur mon domaine précis. Autrement dit le domaine universitaire et non le domaine du travail (CGT...) qui ne me concerne pas (encore). 

Dans la quasi totalité du tract diffusé, l'UNEF ment. Elle ment en faisant croire que c'est un adieu à la retraite par répartition : " nous défendons une société qui donne à chacun la possibilité de bénéficier de la solidarité intergénérationnelle". Ah ? Et est-ce le projet gouvernemental qui remettrait en cause ce principe ? A ma connaissance non. En fait, nous avons là une pure mystification. L'UNEF serait le garant de la retraite par répartition quand le gouvernement en serait le destructeur. Or justement, en reculant l'âge légal de départ à la retraite, on permet au système de répartition de se rééquilibrer un tant soit peu. Nous savons bien évidemment que cette réforme est insuffisante et optimiste parce qu'elle table sur une croissance forte. Mais en instaurant le départ légal à la retraite à 65 voire 67 ans, le gouvernement se suiciderait politiquement. La réforme de l'âge légal est donc juste quoiqu'incomplet. Comme je l'ai dit dans un précédent billet, le réel problème c'est le recul de l'âge maximum de 65 à 67 ans. Or, ledit problème n'apparait guère dans le tract de l'UNEF. Ils nous expliquent également que cette réforme va "contre leurs droits". J'aimerais bien savoir de quels droits parlent t-ils... Mais manifestement, c'est plutôt le droit de milliers d'étudiants voulant étudier qui est violé.

Mais le plus frappant dans ces tracts UNEFiens, ce n'est pas tant l'aspect totalement utopique des réformes proposées - bien qu'elles soient quasi inexistantes -, mais surtout l'aspect victimaire. Ces tracts sont constamment en train de pleurer sur la condition étudiante. Comme si étudier en France se faisait dans des conditions inhumaines.  Pour cela, je vais prendre ma situation personnelle. Ça tombe bien, je suis moi-même boursier. D'une part, les droits d'inscription à l'Université sont nuls lorsqu'on est boursier, d'autre part, les plus pauvres bénéficient à la fois de bourse et d'APL si besoin. L'État fait donc tout pour assurer à l'étudiant une vie décente. Le gouvernement - pour une fois bien inspiré - a même augmenté les bourses de 6%. Mais l'UNEF pleure en nous expliquant que "les jeunes sont devenus une sous-catégorie de citoyen". Pourtant, la condition étudiante est loin d'être laborieuse. De fait, il suffit de regarder ailleurs : les écoles en Angleterre et aux États-Unis sont presque toutes payantes, privées et très chères. En France, en plus d'avoir un système gratuit et public, les étudiants sont subventionnés ! Et c'est tant mieux d'ailleurs. Mais qu'on ne vienne pas dire en retour qu'en France, les jeunes sont des sous-citoyens non considérés. Ces phrases toutes faites ne servent qu'à attiser la haine de certains étudiants, qui finiront dans la rue pour montrer qu'ils existent.

En outre, nous pouvons voir également ceci " nous aspirons à bénéficier des mêmes droits que nos ainés : une retraite solidaire à 60 ans !". J'ai au début crû que c'était une blague. Mais non c'est très sérieux. Car comment peut-on croire qu'en 2060, l'âge ou notre génération ira en retraite - approximativement -, les paramètres n'auront pas changé ? De même, je ne vois pas en quoi la retraite à 60 ans serait solidaire, et celle à 62 ans ne le serait pas... Dès lors, comment faire confiance à un syndicat qui nous explique que dans 50 ans, la retraite à 60 ans devra continuer d'exister ? 
Les mêmes droits sociaux que nos aînés... Le problème, c'est que nos "ainés" ont été la génération archi privilégiée. Et la gauche au pouvoir a accentué les privilèges. Ainsi pendant les 30 glorieuses, l'inflation oscillait entre 10 et 15%, ce qui permettait d'accéder plus facilement à la propriété. Parfois, les taux d'intérêts étaient même négatifs : on remboursait au banquier moins en valeur réelle que ce qu'on lui avait emprunté auparavant. De même, l'accès sur le marché du travail était aisé, tant la pénurie d'emploi était manifeste à l'époque. Sous Mitterand, on a décrété la retraite à 60 ans mais même Jacques Delors à l'époque était opposé. Cette décision était juste dans la mesure ou ceux qui étaient nés en 1920 avaient connu presque 2 guerres, la retraite à 60 ans ( en 1980 donc) était plus que normal. Mais aujourd'hui, avec la mise en concurrence des modèles sociaux, les marges de manœuvre sont très étroites. Or, qui a signé l'acte unique européen ? La gauche. Qui a préparé Maastricht ? La gauche. Qui a concédé à l'Allemagne le fait d'avoir une gestion rigoureuse de la monnaie et le statut d'une banque centrale indépendante dont le seul rôle est de lutter contre l'inflation ? Encore la gauche ! La gauche, à laquelle l'UNEF appartient idéologiquement, la plupart étant au MJS, et assimilés. Dans l'Europe, c'est toujours le moins disant social qui gagne. Ryanair veut le droit social irlandais en France, il ne l'a pas ? Très bien aurevoir. la France, et tant pi pour les 1000 emplois sacrifiés. Voilà l'Europe d'aujourd'hui, c'est la mise en concurrence permanentes des modèles sociaux. N'était-ce pas Barroso qui disait qu'il restait aux PECO "l'arme fiscale" pour attirer les entreprises ? Je veux dire aux UNEFiens que vous manifestez contre des réformes structurelles que le système nous oblige à faire. Vous chérissez des causes utopiques "les années d'études doivent être prises en compte dans le calcul d'annuité", vous chérissez des causes de gauche, mais le système en lui même, vous ne le remettez pas en question. Pourquoi ne dîtes vous pas que la Commission européenne ordonne à la France de déplacer l'âge légal ? C'est marqué noir sur blanc pourtant !  S'en prendre à Nicolas Sarkozy c'est plus facile et ça mobilise plus je vous l'accorde, mais de fait, vous restez dans la pensée unique simpliste : "non au projet de réforme ! Par contre faire quoi je ne sais pas, bon peut-être commencer par prendre en compte les études comme années de cotisation mais..." Bref, contestation stérile.
L'UNEF ment également avec cette argument désormais célèbre mais parfaitement inexacte : "Sarkozy veut faire travailler vieux plus longtemps c'est un million d'emplois qui ne seront pas libérés d'ici 2016". Malheureusement, les les mises en pré-retraites de milliers de travailleurs n'ont pas permis d'améliorer la santé du marché du travail. L'économie n'obéit pas systématiquement à la règle : un poste libéré = un nouveau poste. Sous l'ère Jospin, les entreprises s'en sont surtout servi pour augmenter leur profit en réduisant leur masse salariale...

Ainsi donc, l'UNEF à travers un tract, nous a offert une belle leçon de démagogie, de misérabilisme, et d'inexactitude. Le problème, c'est que la plupart des lycéens et étudiants croient à ce tissu d'âneries évoqué plus haut. Et n'importe quel étudiant est aujourd'hui menacé de ne pas pouvoir étudier parce qu'une poignée de jeunes révoltés font croire que la condition étudiante est terrible.


Tract de l'UNEF.

4 commentaires:

  1. J'ai un ami qui a vu dans sa fac deux inscriptions : "Non à l'UE capitaliste !" et juste en dessous "Non au protectionnisme".

    Perso je pense que les étudiants gauchistes sont pas assez cons, et que ces deux messages viennent de deux personnes différentes (un antilibéral, et un libéral) .. Toi t'en penses quoi ? ;)

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  2. "les années d'études doivent être prises en compte dans le calcul d'annuité"

    A quand les Assedics au CM1 !?
    La jeunesse dans les rues... La jeunesse qui se trouve un bon prétexte pour ne pas aller en cours ouais ! On devrait interdire le droit de grève aux mineurs et les CRS devraient frapper plus fort que les casseurs ne cassent des arrêts de bus à Nanterre ( vus de mes yeux vus).

    L'Etat doit être fort et pour être fort, il faut parler fort. Or, les politiciens dans ce cas précis de faiblesse ne répondent qu'en se justifiant et non pas en énonçant clairement la couleur.
    De Gaulle le disait si bien, "Les français sont des veaux"

    Qu'ils le restent.

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  3. Si je comprends bien, la droite a raison parce que la gauche a tort ?

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  4. @ Liior,
    Bonne question, je demande à voir ça mais j'ai retourné la maxime dans tous les sens, et j'avoue ne pas en comprendre le sens ^^

    @ Eyfiss,
    Bien dit !

    @ Malakine,
    Ne soit pas si sarcastique. J'ai marqué noir sur blanc qu'elle était optimiste, incomplete (...) mais que étant donné que le débat n'a jamais été orienté sur les baby boomer, sur la capacité de la France à créer des emplois (...) il n y a plus que ça à faire.
    Je regrette que les lycéens manifestent contre ça, la plupart sont manipulés par des gens de l'ultra gauche (un des créateurs de page FB réclamant une grande manif' à Rennes appartient au NPA).
    Malakine, tu sais très bien que c'est très facile de mobiliser la jeunesse contre le pouvoir. Mai 68 c'était grève contre De Gaulle : l'homme qui a rendu à la France prospérité et indépendance ! Bref, ce n'est pas à un lycéen qui n'est même pas en âge de voter d'aller manifester. Ce n'est pas son rôle.

    La tournure du débat s'est faite de telle sorte qu'on n'aborde pas la question des "vieux" qui sont éxonérés de toutes tâches. Bertrand nous explique taxer les retraités briserait leur consommation et la croissance. C'est faux bien entendu mais voilà comment le débat sur les vieux a été écarté d'un revers de manche ! Lis mon premier billet sur la réforme des retraites bon sang !
    Je dis qu'en l'état actuel du débat, c'est la seule solution, bien qu'étant imparfaite. O parle pas des vieux, on parle pas de la création monétaire, on parle pas du chômage (...) autrement dit, la seule variable d'ajustement nécessaire à toutes ces occultations : c'est le recul de l'âge légal. voilà la vérité !

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