vendredi 1 avril 2011

Fiction politique

En ce chaud matin d'avril, les secousses politiques n'en finissent plus de surprendre les observateurs, les politologues, les économistes et même les électeurs. En effet, de nombreux hommes politiques ont subitement changé leurs idéologies et ont enfin pris compte les réalités qui s'imposent au peuple. L'auteur présente ici un florilège de quelques personnalités.

Étrangement, Dominique Strauss-Kahn a enfin pris conscience qu'il n'y aura jamais de gouvernement mondial, souhait qu'il émet depuis des années déjà. En effet, il a compris - non sans mal - que les Nations étaient en fait le cadre le mieux approprié pour assurer la démocratie et la prospérité. Il a compris qu'il était utopique de rassembler des nations aux cultures différentes, aux religions différentes, aux histoires différentes, aux structures économiques différentes - ici, le cas de l'euro est criant de vérité - (...) dans un hypothétique gouvernement mondial sensé standardiser les Nations. En outre, il prendra en contre-pied Michel Rocard qui estime que « les souverainetés nationales entrent dans la période de nuisance », en expliquant justement que les Nations sont encore les seuls remparts face à la jungle libre-échangiste qui détricote les acquis sociaux, qui est responsable d'un chômage de masse dans les pays (ex?)industrialisés et peut conduire à de graves troubles sociaux.




M. Strauss-Kahn - mais on peut également citer Jacques Attali - renoncera-t-il un jour à son impossible gouvernement mondial ?


Jean-Claude Trichet a enfin compris que la France pâtissait d'un euro trop fort qui étouffait son économie. Il a écouté des économistes européistes comme Christian Saint-Étienne qui admettent que la France a effectivement « besoin d'un euro faible pour relancer son industrie morose ». Faisant fi des statuts de la BCE, il décide de monétiser massivement les dettes grecques et portugaises afin d'éloigner les spéculateurs d'une part, et de permettre à l'euro de baisser de l'autre. Ainsi, cela constituera une réelle bouffée d'oxygène au sein de la Zone euro qui  participera largement à la décrue du chômage de masse en France notamment.

Olivier Besancenot, pour sa part, a enfin compris que « la politique se faisait sur des réalités » pour reprendre les termes du Général de Gaulle, et non pas sur des bons sentiments tantôt humanistes, tantôt droit de l'hommistes. De fait, il a compris que l'immigration était un moyen pour les grands patrons de faire venir une main d'œuvre peu revendicative et plus docile afin de faire pression à la baisse sur les salaires locaux du fait de la concurrence que se livrent les travailleurs entre eux. Chacun peut voir les effets de la concurrence au sein de l'Union européenne même : le chantage à la délocalisation ouvre la voie à des salariés plus «compréhensifs » sur le plan des revendications salariales et du temps de travail. Le cas Siemens en Allemagne en fournit un merveilleux exemple.

François Hollande renonce à l'idée selon laquelle il serait normal, pour l'État, d'emprunter à la BCE pour financer les dépenses d'avenir. Il prendra parti contre l'article 123 qui interdit à la BCE de prêter directement aux États sans passer par la case banques privés qui n enrichissent qu'une petite poignée d'oligarques financiers sous couvert de rationalité économique.

Marine Le Pen a elle aussi compris quelque chose : surfer sur les passions populaires n'a jamais fait un programme politique. Ainsi, un parti ne peut pas se réclamer du libéralisme, voire du Libéral-conservatisme reaganien en période socialiste - héritage de Poujade et de sa révolte anti Fisc ; et d'autre part, 20 ans après, se réclamer du dirigisme par l'invocation systématique d'un « État fort ». Elle a compris, surtout, que dans une période de grave crise identitaire et économique, il fallait rassembler les français plutôt que de chercher des motifs pour les diviser.

Enfin, le gouvernement français actuel a compris, en écoutant Emmanuel Todd que «  les français étaient malheureux ». Ceci est une phrase vraie et reflétant bien la réalité : chômage de masse, exclusion en augmentation, et allocataires de minima sociaux toujours plus nombreux. On peut d'ailleurs faire un rapprochement avec le vote Front national. Prenant acte de la situation catastrophique du pays, il décide de prendre des mesures exceptionnelles : arrêt provisoire des régularisations de clandestins, redressement d'une école fondée sur le mérite personnel, ce qui passera par une politique de moyens et d'efficacité de sorte que l'investissement en R et D soit au moins doublée d'ici 2014. Prenant acte du manque de dynamisme des PME le gouvernement prend la décision de baisser les charges qui pèsent sur les vrais créateurs d'emplois. Enfin, il décide d'allouer plus de moyens à la police et à la justice afin de préserver la sécurité des français, qui reste le premier « bien public » du peuple.

Malheureusement, cette politique fiction ne durera que le temps, d'un premier avril.

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