samedi 13 février 2010

Le néolibéralisme n'a (malheureusement) pas perdu.

 

Le problème avec une théorie économique erronée, c'est quand elle influence le pays le plus puissant du monde. La révolution néo-conservatrice aux États-Unis  laisse une dette abyssale: 12000 Milliards et une population en voie de paupérisation. Le second problème, c'est quand les dirigeants européens se laissent séduire par ces théories.


Le socialisme à la mode soviétique aura duré 80 ans. L'ultra libéralisme, à peine 30. Ici, j'entends par ultra libéralisme, les méthodes les plus extrêmes regroupant des baisses d'impôts massives, un libre échange total, un retrait de l'État toujours plus poussé ( ce dernier d'après Reagan n'étant pas la solution, mais le problème). De même, cela implique la croyance quasi absolue dans l'économie de l'offre, toujours privilégier l'allègement des charges pour les entreprises conformément à la "citation" de Helmut Schmidt, ex chancelier de la RFA: "Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain." Je reviendrai brièvement  sur cette phrase dans un prochain paragraphe. Autant rassurer le lecteur, il ne s'agit pas ici d'un cours d'économie mais je dois juste effectuer quelques détours historiques. Toutefois, à la fin de mon développement, je m'efforcerai de montrer qu'en effet, le néo libéralisme n'a (dramatiquement) pas perdu et qu'il résiste tant bien que mal à une crise qui contredit pourtant tout ses dogmes!


1870, Léon Walras, économiste Francais ( trop rare pour être souligné), William Jevons ont essayé de modéliser les comportements humains, reprenant ici certaines thèses de Turgot. Celui ci est rationnel, calculateur et fait toujours les meilleurs choix. Ils ont introduit les mathématiques pour démontrer scientifiquement que le modèle de concurrence pure parfaite est bel et bien le meilleur. 
C'est la que tout a dérapé, des économistes contemporains très connus comme Robert Lucas (parmi tant d'autres) (Prix Nobel 1995) se sont servis de ces modèles pour en faire une science arrogante, indépendante et absolue. De là la dénomination inexacte de "science économique".


Alors revenons en à ce que nous avons évoqué plus haut. L'économie devenue science se base désormais sur des dogmes, des vérités immuables. Supprimez le SMIC, il n'y aura plus de chômage. Baissez les charges des entreprises, elles investiront, créeront de l'emploi etc. (Or, encore faut il distinguer les entreprises en France par exemple ou les entreprises du CAC 40 sont soumises à un impôt de...8% quand, pour les PME il peut être 2 fois supérieur!)
Ainsi, lors de la chute du Mur de Berlin, dont je maintiens qu'elle n'a pas été bénéfique pour les européens du fait des délocalisations à l'est, de la toute puissance allemande (que Mitterand craignait déjà à l'époque !) et d'un libre échange total, poussé à l'extrême. Bref, le capitalisme s'est vu trop beau trop vite. Et les économistes avec! Le néo libéralisme aura même perverti la gauche allemande (SPD). Notre gauche, elle s'est retrouvée à privatiser, et effectuer des réductions d'impôts. Mais la droite aussi, a été pervertie. Elle n'a pas toujours été néolibérale. Aujourd'hui, elle est bien loin de la droite glorieuse de l'après guerre qui elle, était  keynésienne.
Le néo libéralisme est devenu la nouvelle pensée unique, on retrouve ce courant dans le Traité de Maastricht, dans la plupart des thèses des prix Nobel, (Lucas, Friedman, Becker...) dans les recommandations des grands instituts OCDE en première ligne puis OMC, FMI, Banque Mondiale... D'ou  notamment le "Consensus de Washignton" 
Cependant, en 2007 la crise des subprimes vient dévaster en quelques mois toutes les thèses néolibérales, à tel point que Bush Fils, qui ne refuserait certainement pas l'affiliation libérale, a même nationalisé une banque, contredisant la vulgate libérale affirmant qu'il faut laisser faire cela purifie le marché et cela supprime les entreprises qui ne sont pas efficaces (comprendre efficace dans la Jungle néolibérale.)
Ainsi les médias ont-ils insisté sur le rôle des traders dans la crise. Au point que ceux ci aient été pris en grippe par la planète entière. Or, ce n'est pas tant les traders qu'il faut condamner, mais le système libre échangiste total. De fait, celui ci a, depuis plusieurs années, empêché les salaires augmenter. Le schéma est simple, on va produire en Chine pour une main d'œuvre docile et peu couteuse, ce qui implique licenciements et délocalisations. Le chômage structurel de masse est donc devenu l'apanage des pays industrialisés. Sauf les pays aux marchés du travail ultra-flexibles comme les États-Unis mais où, nous le savons bien, le phénomène de poor workeur gangrène la société. Toutefois, l'insatiable appétit de consommation des américains, conjugué à une glaciation des salaires a naturellement conduit à un endettement des ménages sans précédent. De là la crise financière.
Néanmoins, nous nous trompons de cible, personne, ni même aucun grand parti ne remet en cause ce libre échangisme total et DE-LO-YAL celui qui nous a mené à la crise. Pourquoi déloyal? Parce que des salariés aux conditions de vies à peu prêt décente sont concurrencés par des quasi esclaves chinois sans sécurité sociale, payé avec un bol de riz et travaillant dans des lieux insalubres. Tant que les campagnes chinoises, qui constituent l'armée de réserve industrielle arriveront en masse, les salaires des ouvriers chinois n'augmenteront jamais et cette odieuse concurrence persistera. Même nos agriculteurs sont victimes! Comment reprocher à un consommateur d'acheter son kilo de tomates en Espagne du fait d'un prix 2 fois moindre? C'est aujourd'hui cela, le modèle de concurrence total, inscrit dans les traités européens mais que aucun des politiques ne veut voir.

"Nous sommes tous Keynésien maintenant". Quelques années plut tard: "mais aujourd'hui nous ne le sommes plus". Milton Friedman s'est battu contre Keynes et maintenant c'est lui qui semble avoir perdu. Mais en fait, ce constat est aux antipodes de la vérité. Jamais, dans les faits Friedman et ses thèses ont été remis en cause. Pêle-mêle, voici des exemples, l'Allemagne prévoit encore des baisses d'impôts favorisants les plus riches, les conservateurs sont partout, Ben Bernanke de  l'école de Chicago (temple de Friedman), à la tête de la FED. Un autre encore à la tête de la ...BCE. Cette dernière est l'archétype de la pensée de Friedman: Inflation zéro, banque indépendante du méchant pouvoir politique. Et tout cela,  gravé dans le marbre du Traité de Lisbonne (et Maastricht). Comme quoi, cependant la crise, les chantres de l'ultra libéralisme, les conservateurs et les tenants du tout-marché ont toujours une place au soleil au sein du monde économique et leurs théories encore d'actualité.



Jean-Claude Trichet, dont l'indécence du salaire sera mentionnée ici: 400000€/mois, louche dans l'affaire du crédit Lyonnais, est LE disciple de Friedman. La BCE a une peur pathétique de l'inflation, et Trichet dit "défendre férocement de l'indépendance de la BCE". Ce n'est rien d'autre que la simple retranscription des dogmes de Friedman. Or ces dogmes se sont avérés faux, pourtant rien ne change.

Par conséquent la crise n'entrainera jamais, à mon sens, la moralisation du capitalisme. D'une part parce que celui est  amoral, d'autre part, parce que la crise, outre la stigmatisation systématique des hauts salaires, n'a pas remis en cause le système libéral poussé à l'extrême: concurrence insupportable, libre échange déloyal, paupérisation chronique des populations des pays développés.
Vraisemblablement, un tel diagnostic suppose un écartement des gens qui nous ont amené la, de faire de nouveau confiance en une force politique honnête avec un programme cohérent, crédible et réellement au service de l'intérêt général.

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